Une méga-pouponnière à truites à La Croche

PÊCHE. L’adage voulant qu’on ne soit mieux servi que par ­soi-même, le pourvoyeur ­Dany ­Tremblay l’a bien compris en démarrant il y a trois ans le ­Centre de ­Développement de l’Omble de ­Fontaine (CDOF), l’une des piscicultures les plus modernes du ­Québec.

Le propriétaire du ­Domaine ­Touristique ­La ­Tuque, dans le secteur ­La ­Croche, a investi près de 2 millions$ dans cette installation d’une capacité initiale de 40 tonnes de truites par année, soit l’équivalent de 500 000 poissons. «  J’en garde environ 15 tonnes pour mes besoins et je vends le reste à des pourvoyeurs et des ­ZECS de la ­Mauricie et de ­Charlevoix  », ­explique-t-il.

Avant la pandémie, on retrouvait une centaine de pisciculteurs au ­Québec, mais une vingtaine ont fermé leurs portes depuis. La construction du ­CDOF a débuté en 2019, mais ce n’est que l’année suivante que les opérations ont commencé. «  J’ai vendu mes premières truites en 2022, mais comme ça prend trois ans pour avoir toutes les grosseurs, ce n’est que cette année que je fonctionne à 100 %  », poursuit ­Dany ­Tremblay.

En termes de production, le ­CDOF figure parmi les dix plus importants dans la province, mais si on se limite aux pisciculteurs qui se consacre uniquement à la truite d’ensemencement – certains produisent aussi de la truite de table – les installations de ­La ­Croche se retrouvent dans le top 5 au ­Québec.

«  ­Quarante tonnes, ça paraît gros, mais je ne suis pas capable de répondre à la demande  », explique ­Dany ­Tremblay qui projette de monter sa production à une centaine de tonnes, c’­est-à-dire plus d’un million d’ombles de fontaine par année. «  ­Toutes mes installations ont été faites en fonction d’une production de 120 tonnes annuellement. Actuellement, le problème qui ralentit mon développement, c’est le manque de ­main-d’œuvre  », déplore le pourvoyeur.

Certifié sans maladie

Quand il a débuté son projet, ­Dany ­Tremblay s’était fixé un haut standard en se donnant l’objectif d’obtenir la certification ‘‘indemne de maladie » du ­MAPAQ. Le ­CDOF est aujourd’hui l’un des cinq producteurs de poissons à pouvoir s’afficher ainsi avec ­Pisciculture ­Jacques ­Roy à ­Weedon, le ­CTSS (Centre de transfert et de sélection des salmonidés) à ­Nouvelle, ­Pisciculture de la ­Jacques-Cartier à ­La ­Patrie et ­Pisciculture des ­Monts de ­Bellechasse à ­Saint-Damien-­de-Buckland.

Deux fois par année, au printemps et à l’automne, des poissons sont envoyés dans une clinique vétérinaire de ­Québec pour y être analysés afin de s’assurer qu’aucune des trois maladies les plus courantes chez les salmonidés (furonculose, maladie bactérienne du rein et nécrose pancréatique infectieuse) ne soit présente dans les spécimens.

«  ­Je ne vends pas mes poissons plus cher que les autres même si ces examens me coûtent environ 5000 $ par année, mais pour moi, c’est une satisfaction personnelle. Les pourvoyeurs savent qu’en s’approvisionnant chez nous, ils auront des truites en santé dans leur lac  », poursuit ­Dany ­Tremblay.

Un protocole rigoureux

Un seul poisson infesté et la certification est immédiatement retirée. Pour la recouvrir, le pisciculteur doit être en mesure de tester négatif trois ans de suite. C’est pourquoi le protocole sanitaire pour entrer sur le site du ­CDOF est très rigoureux.

Les neuf étangs à l’extérieur sont protégés par une clôture empêchant les curieux de s’y aventurer. Dans le bâtiment ­lui-même, l’écloserie, où sont développés les œufs et les alevins, et les bassins de croissance sont des sections distinctes. «  ­Avant d’entrer dans une partie, on doit se désinfecter et faire la même chose en entrant dans l’autre. Ça fait partie du protocole  », explique le propriétaire du ­Domaine ­Touristique ­La ­Tuque.

Les pisciculteurs sont aussi étroitement surveillés par le ministère de l’Environnement quant au calcul de leurs rejets de phosphore dans la nature. «  ­Moi, j’ai deux bassins de sédimentation dans mes installations. Je rejette présentement .001 mg de phosphore alors que mon permis me donne le droit de me rendre jusqu’à 14 kg. La qualité de la nourriture que je donne à mes poissons est un facteur important dans la production de phosphore. La moulée est de meilleure qualité de nos jours qu’elle ne l’était il y a quelques années  », souligne ­Dany ­Tremblay.

Actuellement, un ­méga-projet de pisciculture de plus de 100 millions$ à ­Bécancour est bloqué par ­Québec pour des raisons environnementales. CanAqua voudrait y construire la plus grande ferme piscicole du ­Québec avec une capacité annuelle de 3000 tonnes de truites.