Des événements organisés au Canada pour commémorer l’attaque du Hamas
Au Canada, des prières, des manifestations et une forte présence policière ont marqué l’anniversaire de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, qui a fait environ 1200 victimes israéliennes et déclenché la guerre actuelle.
Les enfants de certaines écoles juives sont entrés en classe sous surveillance policière ce matin dans des villes comme Vancouver et Toronto.
Les endeuillés ont rendu hommage aux victimes des attaques et ont prié pour le retour sain et sauf des otages capturés par le Hamas, tandis que d’autres ont manifesté contre l’action militaire d’Israël à Gaza qui a tué plus de 41 000 Palestiniens selon les autorités sanitaires du territoire.
Les événements se sont déroulés pour la plupart sans problème, mais à Montréal, ce qui a commencé comme une grande marche pacifique pour la Palestine au centre-ville s’est terminé par l’utilisation par la police d’irritants chimiques pour chasser un groupe de manifestants qui ont utilisé des barres de métal afin de briser les portes et les fenêtres d’une maison en construction appartenant à l’Université McGill.
Un orateur masqué et muni d’un mégaphone a affirmé que l’édifice allait devenir un institut de sciences du sport baptisé en l’honneur du milliardaire israélo-canadien Sylvan Adams, et a exhorté les manifestants à «exprimer leur colère sur le bâtiment».
Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a indiqué qu’un «plan de visibilité» a été déployé dans plusieurs secteurs depuis le 1er octobre, il continuera pour encore plusieurs semaines.
«Des effectifs supplémentaires sont sur le terrain 24/7 et une attention particulière est donnée à certains endroits significatifs» pour les communautés juives et arabo-musulmanes, indique le SPVM. Des policiers en civils effectuent également de la surveillance.
Le chef du SPVM, Fady Dagher, a remercié les représentants des communautés d’avoir su agir comme médiateurs pour calmer le jeu et maintenir la paix dans les manifestations. «On essaie d’anticiper l’improbable, mais on ne sait jamais ce qui pourrait arriver. C’est pour ça que le niveau des interventions est beaucoup plus important, beaucoup plus de policiers sont sur le terrain, afin de s’assurer que cette journée historique puisse avoir lieu de manière paisible», a-t-il dit.
«On n’est pas à l’abri de certains événements isolés […], des loups solitaires, c’est eux qui nous inquiètent». M. Dagher souligne qu’il n’a eu vent «d’aucune menace vraiment planifiée, organisée, structurée, à l’égard de quelconque établissement à Montréal».
Depuis un an, l’attaque du Hamas et la guerre qui a suivi ont été au cœur de nombreuses manifestations, allant jusqu’à la mise sur pied de campements universitaires et une augmentation des signalements de crimes haineux contre les juifs et les musulmans.
À Montréal, plusieurs centaines de personnes s’étaient rassemblées au centre-ville pour marquer l’anniversaire par des discours, des dépôts de couronnes de fleurs et des prières, tandis qu’une poignée de manifestants propalestiniens criaient sous surveillance policière.
Channa Leah Natanblut, étudiante à Concordia et l’une des oratrices de la commémoration, a déclaré que les Juifs ont soufferts, sont en deuil et qu’il est important de surmonter cette tristesse en faisant preuve de force.
«Ce fut une année très difficile, mais je pense qu’il est important de montrer aux autres juifs que nous ne sommes pas intimidés par la violence que nous avons vue dans les rues de Montréal […] leurs tactiques de peur ne fonctionnent pas sur nous», a déclaré Mme Natanblut.
La mère d’un Montréalais tué dans les attaques du Hamas du 7 octobre a raconté lors d’un rassemblement que les événements de l’année dernière ont donné à sa famille l’occasion de voir à la fois le meilleur et le pire de l’humanité.
Raquel Look a raconté que son fils de 33 ans, Alexandre Look, est mort en héros alors qu’il protégeait d’autres personnes après que le festival de musique auquel il assistait a été attaqué.
«Je sais qu’Alex a insufflé à mon âme la force de continuer, et je travaillerai sans relâche pour construire un avenir basé sur la paix et la coopération pour tous», a-t-elle dit.
Lors de la marche de protestation séparée de l’Université Concordia à McGill, certains manifestants se sont introduits par une entrée latérale du campus fermé de McGill, renversant une barricade métallique tenue par la sécurité du campus.
Ce groupe a été confronté à un contingent de policiers à cheval, avant d’être chassé hors du campus par la police qui s’est précipitée sur eux, frappant sur des boucliers avec des matraques.
Au début de la marche, l’étudiante de McGill Rama Al Malah a affirmé que les étudiants étaient là pour commémorer un an depuis le début de ce qu’elle a appelé une «campagne génocidaire massive contre le peuple de Gaza». Elle a indiqué que les étudiants manifestants voulaient réaffirmer leur soutien aux Palestiniens et réitérer leurs demandes à Concordia et McGill, notamment le désinvestissement des entreprises liées à l’effort de guerre d’Israël et un boycottage académique des institutions israéliennes.
Dans le reste du Canada
Des milliers de partisans d’Israël se sont rassemblés dans le nord de Toronto lundi soir, plusieurs d’entre eux tenant des photos d’otages ou agitant de petits drapeaux israéliens.
Mayan Shavit, qui a perdu deux membres de sa famille dans le conflit, une tante le 7 octobre et un cousin qui faisait partie des six otages tués en août, a admis qu’elle était surprise en voyant autant de monde à l’événement.
«Il y a un an, le 7 octobre 2023, nous nous sommes réveillés dans un monde complètement à l’envers, a-t-elle confié. Je ne sais pas dans quel monde nous nous sommes réveillés, mais ce n’était pas le monde que nous connaissions tous.»
La police des grandes villes a renforcé ses mesures de protection pendant l’anniversaire.
À Vancouver, les enfants ont été déposés par leurs parents à l’école primaire Talmud Torah sous le regard de policiers portant des gilets pare-balles et d’au moins un chien policier.
Allie Saks, dont deux enfants fréquentent Talmud Torah, a fondu en larmes lorsqu’on l’a interrogée sur la présence policière et le malaise des parents.
«C’est difficile de déposer son enfant dans un endroit où il faut voir la police devant, a expliqué Mme Saks, et c’est émouvant pour nous tous. Nous sommes tous dans un état de deuil aujourd’hui et pour toute l’année – jusqu’à ce que nos otages rentrent chez eux.»
Le chef de la police de Vancouver, l’agent Adam Palmer, a déclaré la semaine dernière que les manifestations présentaient un risque important de désordre lundi, et que des agents formés spécifiquement pour les événements de grande envergure étaient déployés.
Le groupe propalestinien Samidoun préparait un rassemblement à Vancouver, qu’il promouvait en désignant les attentats du 7 octobre comme «Al-Aqsa Flood» (inondation d’Al-Aqsa), le nom de code du Hamas pour l’opération.
Un fourgon de police de Toronto était stationné devant une école hébraïque le long de la rue Bathurst, dans l’un des quartiers juifs les plus reconnaissables de la ville. Au coin de la rue, une grande affiche appelait au retour des otages.
Un peu plus loin, au campus Sherman, un centre tentaculaire de groupes et d’agences juives, des préparatifs étaient en cours pour un événement commémoratif prévu pour lundi soir.
Un porte-parole de la Fédération United Jewish Appeal (UJA) du Grand Toronto, qui organisait l’événement en soirée, a rappelé qu’il était important de se rassembler pour «se souvenir de toutes les vies tragiquement perdues le 7 octobre en Israël, mais aussi pour reconnaître que cette situation est toujours d’actualité».
«Ce n’est pas une occasion de se souvenir de quelque chose qui s’est passé. Nous avons encore plus de 100 otages, dont des membres de familles de Canadiens, qui sont détenus à Gaza par le Hamas», a déclaré Sara Lefton, directrice au développement de l’organisation.
Demandes de réparations
Certaines familles de victimes ont également intenté une action en justice lundi à la suite de l’attaque.
Le père de Tiferet Lapidot, ainsi qu’un autre Canadien qui a perdu des membres de sa famille dans l’attaque, ont déposé une plainte auprès de la Cour supérieure de l’Ontario pour obtenir 250 millions $ de dommages et intérêts en vertu de la Loi sur la justice pour les victimes d’actes de terrorisme du Canada, ainsi que 100 millions $ supplémentaires.
La plainte cite le Hamas, diverses organisations palestiniennes, les dirigeants de l’Iran et de la Syrie et plusieurs individus et groupes canadiens parmi les accusés.
Elle allègue que tous les accusés sont d’une manière ou d’une autre responsables des pertes et dommages causés par les décès. Aucune de ces allégations n’a été vérifiée devant un tribunal.
Les membres de la famille ont déclaré que la dernière fois qu’ils avaient eu des nouvelles de Tiferet Lapidot, c’était lors d’un appel téléphonique depuis le festival de musique Supernova, près de la frontière entre Israël et la bande de Gaza, où le Hamas a lancé son attaque.
«Elle a appelé sa mère à neuf heures du matin, lui disant qu’elle l’aimait et qu’ils tiraient sur des jeunes tout autour», a rapporté lundi son oncle, Harel Lapidot, lors d’un événement à Toronto marquant l’anniversaire.
Un an plus tard, le chagrin de la famille après la perte de la jeune femme qu’il décrivait comme leur rayon de soleil «empire de jour en jour», a indiqué son oncle. Elle était l’une des huit personnes au moins ayant des liens avec le Canada qui sont mortes lors de l’attaque.
«C’était la chose la plus horrible pour nous en tant que famille de perdre Tiferet. Tiferet était une jeune femme heureuse […] qui dansait simplement lors d’un festival», a-t-il ajouté.
Les réponses d’Ottawa
Le premier ministre Justin Trudeau a marqué l’anniversaire dans une déclaration écrite, affirmant que ses pensées allaient à tous les Israéliens et au peuple juif, ainsi qu’à la communauté juive du Canada.
M. Trudeau a condamné le Hamas, que le Canada reconnaît comme un groupe terroriste, et a déclaré que son gouvernement restait déterminé à œuvrer pour une solution à deux États «qui permettra aux Israéliens et aux Palestiniens de vivre en sécurité à l’intérieur de frontières internationalement reconnues».
«Le Hamas a engagé la région sur la voie de la guerre et de la violence. Nous pleurons le décès des Canadiens et de tous les civils tués dans l’année qui a suivi, a-t-il écrit. Nous condamnons le Hamas, le Hezbollah et l’Iran, dont les attaques irresponsables entraînent davantage de morts et d’instabilité».
«Le nombre de vies civiles perdues depuis le 7 octobre est bouleversant et inacceptable, et tous les acteurs doivent respecter le droit international.»
Le chef conservateur Pierre Poilievre a clamé que les otages doivent être libérés et il a condamné ce qu’il a qualifié d’antisémitisme grotesque au Canada. «Nous soutenons Israël sans réserve», a-t-il écrit dans un communiqué.
Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a répété ses appels au retour des otages et a déclaré que les néo-démocrates pleurent avec la communauté juive du Canada.
Les événements de lundi se sont déroulés dans un contexte d’escalade des hostilités au Moyen-Orient.
Le Hamas, qui contrôle toujours la bande de Gaza bombardée, a marqué cet anniversaire en tirant une salve de roquettes sur Tel-Aviv.
Le Hezbollah libanais a juré de maintenir ses propres tirs de roquettes malgré les récentes pertes dans le sud du Liban, où Israël a lancé une incursion terrestre.