Northvolt: «on n’a pas peur de Goldman Sachs», dit Legault

QUÉBEC — Engagé dans des négociations pour sauver le projet d’usine de batteries de Northvolt, le gouvernement Legault assure qu’il n’ajoutera pas un sou dans le projet et ne cédera pas ses garanties sur les sommes investies dans l’entreprise suédoise en difficulté.

Le gouvernement réagit ainsi à un reportage de Radio-Canada qui laisse entendre que Québec serait prêt à perdre une partie des centaines de millions investies dans la filiale implantée ici, en vue sauver la maison mère.

Un des créanciers principaux de la société suédoise, la banque d’affaires Goldman Sachs, exige en effet d’avoir accès aux avoirs des filiales à l’étranger, notamment au Québec, à titre de garanties comme condition pour réinjecter des fonds et sauver l’entreprise.

Une source proche du dossier a confirmé les informations à La Presse Canadienne mardi matin et a laissé entendre que la ministre de l’Économie, Christine Fréchette, serait favorable — un porte-parole du gouvernement s’est interrogé par la suite sur l’origine de cette affirmation.

«Les contribuables québécois se font demander de garantir l’investissement d’une grande banque de New York dans une start-up en Suède», a dénoncé le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, à la période de questions.

Le premier ministre François Legault a assuré que son gouvernement n’allait pas reculer d’un pouce et a envoyé un message à la banque new-yorkaise.

«Si j’étais à la place de Goldman Sachs, avant de rajouter des centaines de millions dans Northvolt, j’essaierais de négocier avec tout le monde. (…) On en a vu d’autres, donc il n’est pas question d’ajouter de l’argent, puis il n’est pas question de retirer nos garanties, puis on n’a pas peur de Goldman Sachs.»

Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon reproche au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) d’avoir investi dans la maison mère et dans des débentures.

«On a envoyé des fonds publics québécois à Stockholm dans une compagnie qui se meurt et actuellement, on est en train de se faire reléguer bons derniers dans la liste des créanciers pour un projet (d’usine) qui ne se fait pas», a tonné le leader indépendantiste.

Selon M. Legault, de grands actionnaires de Northvolt comme Volkswagen ont peur de perdre leurs investissements et Goldman Sachs est prête à réinvestir plutôt que de tout perdre, mais réclame de l’aide au Québec, qui répond par la négative.

«Voyons donc, voir si on va accepter de prendre de l’argent dans Northvolt Québec pour l’envoyer en Suède, que (M. St-Pierre Plamondon) arrête de dire n’importe quoi!»

«On est en négociations et on travaille à protéger les intérêts des Québécois», a indiqué Mme Fréchette à la période de questions.

«On s’assure que ça va aller de l’avant», a-t-elle ajouté.

«Vous avez négocié quoi vraiment? (Elle) est incapable de négocier avec Goldman Sachs», a accusé le député libéral Frédéric Beauchemin.

«Combien vaut notre investissement? On n’a plus de garanties, donc ça vaut moins. (…) Il n’y a plus de commandes, donc ça vaut moins.»

Dans un message, une source gouvernementale bien informée a indiqué mardi que Québec veut préserver les 500 millions $ misés par Investissement Québec.

Car en effet, cette mise de fonds pourrait être à risque. Goldman Sachs serait prête à réinjecter des fonds pour assurer le salut de la maison mère, en autant qu’elle obtienne en garantie les avoirs de l’entreprise à l’étranger, par exemple les fonds dans le compte de Northvolt au Québec.

En outre, la Caisse de dépôt et placement du Québec a également investi 200 millions $ dans l’aventure.

Les 500 millions $ investis par Québec comprennent 270 millions $ dans le financement de la maison mère et 240 millions $ dans l’achat du terrain prévu pour ériger l’usine de batteries, en Montérégie.

Le gouvernement Legault garderait en garantie les 240 millions $ du terrain, a indiqué la source proche du dossier.

Rappelons que Northvolt a dû licencier 1600 employés récemment et que le gouvernement suédois a refusé de lui venir en aide.

Québec a déjà consenti donc au total 700 millions, mais un autre montant de 300 millions $ devrait être versé en débentures, c’est-à-dire un prêt à long terme non garanti, mais sous certaines conditions.

M. Legault avait évoqué deux des conditions qui font que cette enveloppe n’a pas encore été accordée.

La première, que le financement du projet soit complété, et la deuxième, que l’usine soit en construction. Or, le chantier n’en est pas encore à cette étape.

Le total de la mise du Québec serait donc de 1 milliard $, pour un projet total évalué à 7 milliards $, où Ottawa met aussi 1,37 milliard $. Mais le fédéral n’a pas encore versé un sou.