Vaste mobilisation pour TVA et l’information régionale
Plus d’une centaine de personnes se sont réunies, lundi en fin d’avant-midi, devant les bureaux de TVA Trois-Rivières pour montrer leur soutien à la station régionale et pour réitérer l’importance de l’information régionale.
De nombreux représentants de la classe politique de la Mauricie étaient présents pour l’occasion, tout comme des intervenants des milieux culturel, sportif, communautaire et de l’éducation.
« Il faut envoyer le signal que l’information régionale et les salles de nouvelles régionales sont importantes parce qu’elles font vivre la région, lance le maire de Trois-Rivières, Jean Lamarche. On n’a rien contre l’information nationale, mais on a besoin de faire savoir au reste du Québec qu’on est là et qu’on est bien vivant. C’est clair qu’il y a une transformation qui se fait en ce moment dans les médias, mais il ne faut pas qu’elle se fasse nécessairement au détriment de l’information régionale. »
« Dans les plus petites municipalités, on a des enjeux aussi. On veut qu’on parle de chez nous, qu’on dise ce qui se passe chez nous. Il faut garder les médias régionaux chez nous. Je veux pas juste entendre les choses de Montréal ou de Québec », poursuit le maire de Louiseville, Yvon Deshaies.
« Il y a des enjeux importants dans tous les médias présentement. Il y a une seule chose qui peut faire en sorte de changer la donner, c’est une mobilisation importante. J’ose espérer que cette mobilisation est un premier pas pour d’autres actions », commente à son tour le maire de Shawinigan, Michel Angers.
Chez TVA Trois-Rivières, ce sont 70% des employés qui perdront leur emploi dans les prochains mois, au même titre que 547 employés de TVA à travers le Québec. Les bulletins de nouvelles régionaux seront alors réalisés à Québec.
« L’information régionale, ça fait partie de l’appartenance des citoyens dans une région. Je suis donc très inquiet de ce qui se passe. En 2007, quand je me suis présenté aux élections, il devait y avoir une dizaine de journalistes. Là, je me demande en 2026, lors de la prochaine élection, combien y aura-t-il de journalistes? Comment va-t-on faire pour suivre les campagnes électorales provinciales? Ça fait partie de notre démocratique. Je pense que le gouvernement, les entreprises privées et les citoyens, nous avons tous une réflexion et des actions à faire par rapport à ça », enchaîne Donald Martel, député de la circonscription Nicolet-Bécancour.
« Nos médias régionaux sont importants pour faire entendre la voix des organismes communautaires. Avec les coupes qui sont annoncées à TVA, je ne suis pas sûre qu’on va passer dans les priorités. On risque de ne pas avoir d’espace pour exprimer les besoins des gens qu’on rejoint. Pour nous, c’est super important que les journalistes, les journaux et les médias régionaux continuent d’être forts pour pouvoir transporter ce que notre région a à dire », affirme Sylvie Tardif, coordonnatrice de l’organisme COMSEP.
Cassandre Forcier-Martin, cheffe d’antenne à TVA Trois-Rivières
« La presse régionale, c’est la survie de la démocratie, renchérit Louis Plamondon, député de Nicolet-Bécancour-Saurel. S’il n’y a pas de presse régionale, comment pouvez-vous glorifier les jeunes sportifs, faire connaître la situation des itinérants dans la région ou encore rappeler à un conseiller municipal ou à un député un engagement pris pendant une campagne électorale qui ne se réalise pas? Ce n’est pas la presse nationale qui va pouvoir en tenir compte dans chaque petit coin du Québec. Quand tu perds un emploi dans une salle des nouvelles, c’est la démocratie qui diminue. »
Le Bloc Québécois entend notamment demander au gouvernement fédéral la création d’un fonds de 50 M$ pour soutenir les médias. M. Plamondon suggère aussi que la publicité faite par les entreprises sur Meta (Facebook/Instagram) ne soit pas déductible d’impôt. « Ça pourrait en encourager beaucoup à faire leur publicité dans les médias pour aider la presse régionale. Et quand on voit les coupures qui se font, c’est très inquiétant. »
« Il y a une foule de pays dans le monde où les médias sont financés par le gouvernement sans aucun problème. Il faut voir. Là, les gens voient des complots où il n’y en a pas. Il faut faire attention. On doit analyser le problème de manière plus froide. L’information, c’est un bien public et on doit absolument la soutenir parce que c’est comme ça que la démocratie va survivre », ajoute René Villemure, député de Trois-Rivières.
Ce dernier a annoncé une campagne de soutien aux médias locaux, campagne qui se déploiera au cours des prochaines semaines. M. Villemure a dégagé un budget spécial à même ses fonds de circonscription pour créer une campagne publicitaire visant à soutenir les médias trifluviens et mauriciens, ainsi que leurs artisans.
Le directeur général de Culture Mauricie, Éric Lord, s’inquiète également de la situation. « C’est l’effritement des médias régionaux. Pour la culture, c’est le lien entre le milieu culturel et les publics. On n’a plus de médias spécialisés comme Le Voir, Le Sorteux et tout ça. On voit toute cette couverture disparaître ou s’effriter et c’est vraiment triste. Dans le cas de TVA, c’est un gros morceau qui part », commente-t-il.
Une mobilisation qui fait chaud au cœur
« Ça nous fait chaud au coeur de voir la réponse à cette mobilisation. On voit que le message est vraiment fort aujourd’hui devant la station de TVA Trois-Rivières. C’est le message qu’on voulait envoyer aux décideurs: il est temps de protéger notre information régionale. On a bon espoir de sauver des emplois ici, mais il faut se positionner aussi en tant que société », souligne Charel Traversy, journaliste à TVA Trois-Rivières.
« On voit que les gens sont attachés à leur information régionale, au bulletin de TVA Trois-Rivières. Une fois que ça c’est dit, il y a une crise présentement. On est plongé dedans, pas seulement TVA. Il va falloir trouver des solutions et vite », ajoute Marie-Claude Paradis-Desfossés, journaliste à TVA.
Pour Paule Vermot-Desroches, représentante de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) – région Mauricie, il faudra que cette mobilisation mène également à des actions concrètes.
« Il ne faut pas juste que les gens soient présents et disent qu’ils nous aiment. On espère qu’il y ait des actions gouvernementales. Il y a un modèle à revoir présentement et il faudra que ça vouge parce que ce n’est pas juste TVA qui est affecté, mais bien l’ensemble des médias. Aujourd’hui, c’est TVA, mais demain, ce sera quelqu’un d’autres », note-t-elle.
« On doit arrêter de considérer l’information comme un bien de consommation. L’information est un bien public et essentiel à une société démocratique. C’est un choix de société qu’on fait d’être bien informé, ajoute-t-elle. Il y a des études qui prouvent qu’aux États-Unis, par exemple, après quelques années sans couverture locale, des localités voient le coût des services publics augmenter parce qu’il n’y a plus personne pour surveiller les intérêts des citoyens et s’assurer que les contrats se donnent de la bonne façon, au bon prix. »