La camerise: le nouveau super fruit
AGRICULTURE. Méconnue des Québécois il n’y a pas si longtemps, la camerise fait de plus en plus le bonheur des amateurs de petits fruits.
On dit que sa saveur est un mélange de cassis, de bleuet et de framboise. Riche en vitamines A et C, son pourcentage d’antioxydants dépasse celui du bleuet et de la canneberge.
À La Tuque, trois entreprises ont sauté dans l’aventure, en 2012, alors que personne n’en produisait encore dans la région. La ferme Kroft, la ferme GDM Ricard et les Beaux Prés de Saint-Louis ont alors fait le pari que le nouveau superfruit allait séduire les amateurs.
Puisqu’il faut laisser le temps aux plants de croître, c’est depuis 2015 qu’on cultive la camerise.
«On a commencé avec 1500 plants et on a agrandi pour se rendre à 6000 plants», rapporte fièrement Gilles Ricard, qui possède la ferme GDM Ricard avec son fils Martin.
«On a commencé avec 1500 plants et on a agrandi pour se rendre à 6000 plants»
– Gilles Ricard
Le travail ne se passe pas seulement à la période où les fruits sont prêts à être cueillis. Il faut tailler les plants chaque automne et chaque printemps.
«C’est un gros passe-temps», n’hésite pas à dire Gilles Ricard, retraité. Son fils est toujours en emploi, à l’usine West Rock, mais ses vacances de juillet se passent dans le champ de La Croche.
Pourquoi la camerise ?
La camerise tolère, au printemps, des températures allant jusqu’à -7 °C. «Côté maladie, on n’en a pas trouvé encore», ajoute Gilles Ricard.
Le fruit arrive un peu moins tardivement que le bleuet. La récolte peut débuter autour du 7 juillet pour se terminer au plus tard au milieu du mois d’août.
L’aspect de la nouveauté aura convaincu les Ricard de se lancer dans l’aventure. «C’est un nouveau fruit. Il y a une émergence de popularité. On s’est dit Go! On essaye», lance Martin Ricard.
Depuis trois ans, la ferme GDM Ricard reçoit les cueilleurs dans ses champs. Cette année aura été la plus populaire parmi les familles de La Tuque comme d’ailleurs.
«Est-ce que c’est parce qu’on en distribue chez IGA, depuis 3 ans?» demande Martin Ricard.
«On voit qu’il y a beaucoup de gens qui viennent et d’année en année, il y a de nouvelles personnes», ajoute Gilles Ricard.
Comme toutes les entreprises, il aura fallu intégrer à l’autocueillette les directives imposées par la santé publique en marge de la pandémie.
Question de ne pas se faire damer le pion par les oiseaux et les insectes, un système de filets est apposé dès la mi-juin au-dessus des plants. On se méfie particulièrement du jaseur des cèdres, un oiseau qui fait parfois des ravages parce qu’il apprécie le fruit, lui aussi.
L’entreprise tient à n’utiliser ni herbicides ni insecticide autour de sa production.
Le 3/4 de la production de la ferme GDM Ricard est dirigé vers une usine de congélation, à Saint-Bruno, au Lac-Saint-Jean.
Le reste de la production, environ 700 livres sont destinés à l’autocueillette et aux ventes locales.
Les produits du terroir sont populaires. La microbrasserie le Mouton noir brasse une bière à la Camerise et aux framboises.
Plusieurs variétés
Au moment du passage de l’Écho de La Tuque, des cueilleurs mettaient la main sur une variété un peu plus tardive de camerises, l’aurora, au goût plus sucré.
Sept variétés de camerises sont cultivées, dont certaines sont utiles pour la pollinisation
Le fruit se congèle bien: il conserve ses propriétés et préfère demeurer au frais plutôt qu’à la température ambiante.
La canicule n’a pas causé de maux de tête aux Ricard. Un système d’irrigation sous les paillis à partir d’un lac a permis aux différents plants de ne pas manquer d’eau au cours de l’été, malgré le soleil de plomb.
«Côté bouffe, on fait n’importe quoi avec ça. On peut faire des tartes, des confitures, des croustades, des smoothies, qui sont très populaires. C’est très bon», suggère Gisèle Hébert, conjointe de Gilles Ricard, qui assiste également aux opérations de l’entreprise.
La canicule, ennemie des agriculteurs
Entreprise de 3600 plants, les Beaux Prés de Saint-Louis a poursuivi ses opérations, malgré les canicules successives qui complexifient la saison.
L’entreprise de Lac-à-Beauce ne dispose pas d’un système permettant d’irriguer ses champs en cette période où la sécheresse s’est fait sentir: la récolte a été ardue à cause de la température, relate Francine Beaupré, une des propriétaires.
«C’est un fruit qui est fragile. Mais c’est un fruit tellement bon pour la santé. C’est incroyable!»
– Francine Beaupré
La chaleur allait même jusqu’à endommager le fruit lui-même, alors il fallait user de prudence. Ils sont d’ailleurs nombreux, les agriculteurs, à avoir décrété que 2020 est une année à oublier.
Pour réaliser la récolte avec succès, il fallait profiter d’une fenêtre spéciale de 1h30 à 2h dans une journée où c’était plus facile.
On a produit un peu moins cette année, mais ça n’a pas empêché d’effectuer une livraison de fruits de qualité pour la microbrasserie la Pécheresse, qui concocte chaque été une bière à la camerise, Mme Rose. Les entreprises locales répondent présentes quand c’est le temps d’offrir des produits du terroir.
«C’est notre premier client. Ce sont les premiers qui ont cru en nous», lance Francine Beaupré, visiblement reconnaissante.
Kirano Sante produit aussi un kombucha et des confitures à la camerise des Beaux Prés de Saint-Louis.
Fruit méconnu
Sa culture a considérablement évolué au fil des dernières années. Francine Beaupré a donné en exemple qu’au début, on se contentait de dire aux gens de la récolter aux alentours du 24 juin. Le fruit n’étant pas encore assez mûr, les gens qui y ont alors goûté ne l’ont pas aimé. Aujourd’hui, la camerise est récoltée plus tard. Son goût, plus sucré, explique l’engouement qu’elle connaît actuellement.
Il ne reste qu’à espérer que l’an prochain réserve une température plus propice à la culture, pour le bonheur des producteurs de camerises… et de ceux qui adorent le nouveau superfruit !