Les Atikamekw de Wemotaci veulent être partenaires d’Hydro-Québec dans ses rénovations de centrales
Le chef de la communauté de Wemotaci, François Néashit, accompagné de membres du conseil et de quelques résidants ont manifesté au pied de la centrale Rapide-Blanc d’Hydro-Québec.
Ils dénonçaient le fait que les importants travaux au coût de 613M$, entrepris récemment, l’ont été en l’absence d’entente avec les Premières nations.
Les Atikamekw pensent qu’une part des investissements devrait permettre l’octroi de contrats aux entreprises de la communauté en plus de former et embaucher des travailleurs de Wemotaci. Le conseil exige l’arrêt des travaux et demande une rencontre de haut niveau avec la haute direction d’Hydro-Québec pour la mise sur pied d’une table de négociations «devant mener à la création d’une nouvelle relation basée sur la reconnaissance et le respect mutuel».
M. Néashit a affirmé avoir transmis dernièrement une lettre à la nouvelle présidente-directrice générale d’Hydro-Québec Sophie Brochu pour lui faire valoir son mécontentement, «à l’égard de l’attitude de la société d’État qui procède à des travaux sur le territoire ancestral non cédé des Atikamekw, le Nitaskinan, sans aucune femme de compensation, ni consultation». La lettre, selon M. Néashit, est restée sans réponse.
«Nous voulons passer le message suivant : pas de projet d’Hydro-Québec sans partenariat avec Wemotaci», tranche le chef.
Aucune entente ou contrat n’ont été signés avec les entrepreneurs de Wemotaci : «C’est scandaleux quand on sait qu’il s’agit de notre territoire et de nos ressources». Le chef pense qu’avec un taux de chômage 26 %, les travailleurs et les entreprises de Wemotaci «doivent obtenir leur juste part des contrats pour la réhabilitation de la centrale Rapide-Blanc».
«Nous ne sommes pas contre le développement. Au contraire, on veut en faire partie»
-François Néashit
Wemotaci demande un engagement d’Hydro-Québec pour des contrats de gré à gré aux entreprises de la communauté et des programmes de formation et l’embauche de travailleurs de Wemotaci pour l’ensemble des projets de réfection des installations sur le territoire ancestral. S’ils n’ont pas toutes les compétences pour les travaux, les Atikamekw veulent un programme de formation qui leur permettra d’y accéder.
«Dernièrement, on a une rencontre avec des dirigeants d’Hydro-Québec où on a parlé de formation. Tout ce qu’on nous a offert, ce sont des programmes de stages», laisse tomber le chef de Wemotaci. Il ne croit pas que le geste de sa communauté vienne indisposer Hydro-Québec face à des projets comme Manouane Sipi.
Des pressions
La manifestation de Rapide-Blanc est une première action des Atikamekw pour faire entendre raison à la société d’État. «S’il n’y a pas de retombées, on va sûrement penser à d’autres actions dans un assez court laps de temps», prévient François Néashit.
Des actions juridiques sont envisagées, et des blocages de chemins ne sont pas exclus : «Ça pourrait aller jusque-là, mais on sait qu’un blocage, ça bloque une fois, mais ça ne débloque pas toujours ce qui est souhaité par les autochtones».
Une belle opportunité
Le chef Néashit ne le cache pas, l’arrivée de Sophie Brochu à la présidence d’Hydro-Québec peut constituer une belle occasion de rétablir les ponts avec les Premières nations. Avec son arrivée en poste, François Néashit dit avoir ressenti un nouveau discours.
«Nous croyons que l’arrivée de Mme Brochu à la tête de la société d’État est une belle opportunité pour amorcer une nouvelle relation. Nous ne sommes pas contre les projets et le développement. Nous souhaitons au contraire être des partenaires de ces développements, le tout dans le respect de nos droits et des principes du développement durable. Hydro et tout le Québec se sont enrichis en exploitant notre territoire, pendant qu’on nous maintenait dans la pauvreté. Il est temps que ça change», tient à préciser le Chef Néashit.
En toile de fond, le fait que le premier ministre François Legault ait affirmé dernièrement que les Premières nations devaient faire partie de la relance économique du Québec, ce que n’a pas manqué de souligner François Néashit.
Il ne cache pas que le fait de ne pas reconnaître les droits des Premières nations peut aller chercher une notion de racisme systémique, dont on parle beaucoup, ces jours-ci : «C’est ce qu’on a toujours senti, depuis Christophe Colomb […] On a toujours été tassés, toujours plus au nord».
«Le temps où l’on acceptait de voir notre territoire exploité sans notre consentement est révolu. Dorénavant, nous serons incontournables. Il n’y aura plus de projets sans notre accord », a conclu M. Néashit.
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