Télévision communautaire : fin des émissions le 1er octobre
Plus de quarante ans voués à montrer la vie de La Tuque
TÉLÉVISION. La télévision communautaire de Câblevision (TVC), qui peut être captée au poste 209 sur le câble, cessera ses émissions le 1er octobre prochain.
La gestionnaire principale, relations médias chez Bell, Vanessa Damha, a confirmé la nouvelle à L’Écho de La Tuque, mentionnant que l’entreprise terminera son partenariat avec l’actuel directeur de la télévision communautaire, André Mercier.
Actuellement, les séances publiques du conseil municipal et d’agglomération de La Tuque, le télébingo du Carrefour d’action bénévole du Haut-Saint-Maurice, la Campagne du Gâteau, le lancement de la programmation du Complexe culturel Félix-Leclerc ainsi que la messe dominicale de l’église Saint-Zéphirin sont présentés en direct. Les organismes communautaires y publient également leurs activités dans des messages qu’on peut lire tout au long de la journée. Le club Rotary y a présenté son télébingo pendant 27 ans, chaque mercredi.
Mme Damha précise que Câblevision demeure ouverte à tout projet de contenu local pouvant être diffusé sur le câble. Les personnes intéressées doivent contacter le CRTC au sujet d’une licence d’entreprise de programmation communautaire : «Nous serions alors ravis de discuter de la possibilité de diffuser une telle programmation sur notre réseau et nous pourrions également faire don de matériel de production et de mise en ondes».
L’âge d’or de la TVC
Il fut un temps où la programmation de la TVC était nourrie et variée. L’âge d’or de la TVC a vu de nombreux animateurs, cameraman et metteurs en ondes y trouver un emploi de surnuméraire.
Au début des années 80, les employés de la TVC devaient faire la diffusion en différé des émissions de Radio-Québec (aujourd’hui Télé-Québec), qui arrivaient sur des cassettes bêta, en même temps qu’ils présentaient les émissions locales de la télévision communautaire.
C’est en 1982 que les propriétaires d’Électrovision, les Latuquois Philippe Brassard et Brian Braitwaite, ont acheté des équipements performants servant à présenter les émissions en couleurs. C’est à ce moment que des contacts ont été entrepris auprès des conseils municipaux de La Tuque, de l’ex-municipalité de Haute-Mauricie, de l’ancienne Commission scolaire du Haut-Saint-Maurice et de l’ancienne MRC du Haut-Saint-Maurice pour connaître leur intérêt de diffuser les assemblées publiques à la télévision communautaire. On pouvait les voir en différé au moins deux fois chacune. Le conseil municipal de La Tuque a notamment été diffusé en direct.
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Des émissions à caractère politique, d’actualité, sportif et communautaire étaient présentées, en soirée au canal 10 sur le câble, à partir de 18h, parfois jusqu’à 22h.
À lui seul, l’actuel directeur de la programmation de la TVC, André Mercier, a encadré plus d’une vingtaine de jeunes qui y ont appris tous les rouages techniques, depuis son arrivée, en 1980, alors que la programmation était diffusée en noir et blanc.
Chaque mois, les députés provincial et fédéral faisaient assidument le point sur les grands enjeux de leur comté. Les organismes sociaux, sportifs et communautaires locaux y trouvaient une tribune pour mieux se faire connaître. Les propriétaires d’Électrovision croyaient beaucoup à l’importance d’offrir une programmation locale diversifiée aux téléspectateurs de La Tuque via la TVC. Ils n’hésitaient d’ailleurs pas à investir dans les équipements et les décors et donnaient carte blanche à l’équipe pour produire des émissions intéressantes. Marc Rochette, Robert Laflamme et André Mercier ont successivement dirigé les émissions de la TVC.
«Lâché lousse»
Puis, au tournant des années 90, les émissions «Lâché lousse», puis, «Bien branché» ont suivi l’actualité avec l’animatrice Claudia Martel, épaulée d’une multitude de chroniqueurs et de Robert Laflamme et Claudey Scarpino, à la réalisation. L’équipe était présente dans toutes les conférences de presse et les principaux événements locaux.
«Pendant plus d’un an et demi, Claudey Scarpino travaillait à temps plein pour produire Lâché Lousse», rapporte André Mercier. Dans ses plus fortes années, la télévision communautaire a donné du travail à cinq ou six personnes. «C’était regardé», se souvient André Mercier.
Média local à part entière, la TVC a aussi présenté la première mouture des Jeudis centre-ville, alors une émission culturelle d’entrevues et de prestations musicales, à laquelle les gens pouvaient assister sur place. C’était présenté en direct du stationnement de l’ancien Hôtel de Ville de La Tuque, aujourd’hui Place du Parc.
La caméra dans l’ADN
Alors jeune élève de secondaire 3, Robert Laflamme a trouvé un emploi comme étudiant à la TVC et y est revenu, après ses études postsecondaires. Plusieurs étudiants ont d’ailleurs fait leurs classes dans la technique à la TVC.
Passionné de la caméra, il aura touché à tout, comme plusieurs, de la technique, à la direction de la télé communautaire, en passant par l’animation, qu’il a dû assumer au pied levé à certaines occasions.
C’était un emploi très formateur pour tous ceux qui ont travaillé, car il fallait sans cesse utiliser sa débrouillardise pour innover. «J’ai fait de la caméra, du son, du montage, j’ai roulé des fils», évoque M. Laflamme.
Caméra à l’épaule, les gens d’Électrovision filmaient les événements locaux avec une bobine qui tenait avec une sangle.
Des panneaux de styromousse, un peu de peinture et beaucoup de créativité suffisaient pour créer les décors des émissions maison.
Un bulletin hebdomadaire d’informations locales était présenté en direct et on voyait un écran de télé à côté de l’animateur, pour alimenter l’aspect visuel. «Il y avait une caméra dont on se servait pour montrer les photos «à la mitaine». Un gars était attitré seulement pour filmer les photos qui avaient rapport à la nouvelle, qu’on voyait apparaître sur l’écran», témoigne M. Laflamme. Cela contraste évidemment avec les moyens d’aujourd’hui. Système D oblige : on utilisait un carrousel, qui servait pour le babillard des organismes locaux, pour présenter le générique de fin d’émission, écrit en blanc avec un ruban Dymo, sur un carton au fond noir, pendant que jouait la musique de la fin.
«Ce n’était pas facile comme aujourd’hui. Il y avait toujours un «challenge», mais c’était le fun. Quand tu réussissais ton montage, tu étais fier», ajoute-t-il. Cette débrouillardise l’aura même amené à un emploi de caméraman surnuméraire, dans le passé, à TVA Nouvelles.
Parmi les anecdotes qui l’ont marqué, il note l’historique saisie de drogue de Casey en 1992. Par hasard, il passe devant l’aéroport de La Tuque, en soirée, au moment où étaient amenés des accusés dans cette histoire. Sa caméra est dans la voiture : grâce à sa carte du cercle de presse Jean-Delage, l’ancien regroupement des journalistes de La Tuque, il peut tout filmer. TVA avait même diffusé ses images.
Un bon citoyen corporatif
Quant à André Mercier, il a souligné l’implication sociale de Câblevision. En bon citoyen corporatif dans le milieu : le câblodistributeur a toujours télédiffusé gratuitement le télébingo actuel et celui du club Rotary en plus d’avoir assumé les frais de la diffusion de la Campagne du Gâteau, en défrayant notamment le salaire d’un technicien chargé des branchements et du travail technique.
«Je ne garde que de bons souvenirs de mon implication auprès d’Électrovision et de Cablevision», a-t-il conclu. Respectant cette décision, il a d’ailleurs tenu à remercier l’entreprise pour avoir maintenu le service de télévision communautaire pendant toutes ces années, alors qu’elle n’avait aucune obligation de le faire.